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Laure Calamy tueuse de chauffards : vous avez rarement vu un film comme Bonne conduite en France

Troisième long métrage réalisé par Jonathan Barré (mais le premier écrit sans ses compères du Palmashow), "Bonne conduite" mélange la comédie policière, et le slasher, avec un soupçon de giallo. Résultat : un film étonnant et détonnant.

ÇA PARLE DE QUOI ?

Pauline a une méthode bien à elle pour faire de la prévention routière : formatrice dans un centre de récupération de points le jour, elle se transforme en serial killeuse de chauffards la nuit.

BOULEVARD DE L'HUMOUR

L'an passé, Grégoire Ludig et David Marsais nous avaient présenté Les Vedettes, second long métrage du Palmashow après La Folle Histoire de Max et Léon, comme leur "deuxième premier film". Peut-on alors considérer Bonne conduite comme le troisième baptême du feu de Jonathan Barré, leur réalisateur habituel, qui pilote seul ce récit sans ses compères de toujours ?

Si l'on retrouve plusieurs acteurs de leur univers (Julien Pestel, Sixtine Aupetit, Marion Creusvaux, Thomas VDB, David Salles) et que Grégoire Ludig et David Marsais y tiennent des rôles clés, Bonne conduite n'est officiellement pas un film du Palmashow. Mais on y retrouve régulièrement leur esprit, preuve supplémentaire de l'importance de la mise en scène de Jonathan Barré dans leur manière de détourner les émissions, films, séries et genres.

Et de genres, il en est question ici. Au pluriel. Dès la scène d'ouverture, prenante et stylée avec ses lumières fluo, sa musique électro et son utilisation des rétroviseurs comme cadres dans le cadre. Une séquence qui n'est pas sans rappeler le Boulevard de la Mort de Quentin Tarantino et convoque aussi bien l'esprit des slashers des années 80 type Maniac que l'esthétique du giallo.

Une scène comme on en voit rarement dans le cinéma français, pour lancer ce récit qui s'apparente vite à une histoire de serial killer américain... tournée en Bretagne. Tous les codes sont là, et le décalage vient en grande partie du décor de l'action, des moyens locaux et du duo de flics incarné par David Marsais et Grégoire Ludig, en sosie narbonnais du Colin Farrell de Miami Vice. L'amour des films catastrophes en plus.

CONDUITE FLUIDE

Comédie, thriller, épouvante... Si le rythme est un peu moins soutenu à mi-parcours et que l'ensemble n'est peut-être pas aussi radical qu'on pourrait l'imaginer, Bonne conduite embraye avec fluidité d'un genre à l'autre, et Jonathan Barré confirme son aisance dans les différents registres auxquels il s'attaque. Y compris l'émotion, qui donne tout son sens à l'histoire.

Car derrière les actions de Pauline Cloarec (Laure Calamy, excellente et dans la lignée du rôle trouble qu'elle tenait dans L'Origine du Mal) et sa manière bien à elle d'assurer la sécurité routière se cache une vengeance aux accents personnels, qui aide le spectateur à faire preuve d'empathie pour cette cousine bretonne de Dexter Morgan.

La série portée par Michael C. Hall qui n'est pas la seule référence à laquelle on pense, puisque le long métrage cache dans son coffre des clins-d'œil plus ou moins évidents à Seven et Rocky. Ou encore La Cité de la Peur, ce qui creuse un peu plus encore la filliation entre les Nuls et le Palmashow, même dans un opus un peu à part dans leur filmographie commune.

Entre son côté hybride, sa musique signée Charles Ludig ("Besoin de chanter" dans Les Vedettes, c'était déjà lui), sa manière de parfois étirer l'humour sur la durée ou ses deux enquêteurs qui ont deux ou trois temps de retard sur les faits, Bonne conduite surprend et tente des choses pour sortir du tout-venant hexagonal en matière de cinéma. Le plus souvent avec succès, à tel point que l'on a hâte de voir ce que le metteur en scène nous réserve ensuite. Avec ou sans le sceau du Palmashow.

Et pourquoi pas une nouvelle enquête, dans un tout autre cadre, de Kervella et Giordano, qui deviendraient ainsi, pour Jonathan Barré, l'équivalent de ce qu'est Benoît Blanc (Daniel Craig) pour Rian Johnson, autre cinéaste passé maître dans l'art de jouer avec les codes des genres qu'il aborde ?

publié le 29 mars, Maximilien Pierrette, Allociné

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