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Last Dance : un regard neuf sur le mouvement drag

"Last Dance" propose une plongée dans l'univers Drag de La Nouvelle-Orléans en compagnie de Lady Vinsantos, personnage aussi libre que fantasque. Un documentaire qui dynamite les idées reçues sur un milieu que vous pensiez connaître.

AlloCiné : Comment avez-vous fait la connaissance de Lady Vinsantos, le personnage principal de Last Dance ?

Coline Abert (réalisatrice) : J'ai rencontré Lady Vinsantos au champ de course de La Nouvelle-Orléans, alors qu'elle/il revenait d'un show à Cleveland. Il/elle avait oublié son maquillage pour effacer ses sourcils, alors elle/il avait dû les raser. Son apparence était un mélange de contradictions et questionnait le genre, j'ai tout de suite été interpellée. Puis, un ami commun nous a mis en contact. Lors de notre première rencontre, Vinsantos m'a parlé de son école de Drag Queens et j'ai immédiatement été intriguée.

Vous révélez l'existence de ce drag queen en même temps que vous en annoncer la disparition. Il y a quelque chose de frustrant mais sublime dans votre démarche...

Eh oui, le réel est parfois cruel :) Mais Vinsantos continue à performer, non plus avec Lady Vinsantos, mais son personnage masculin et clown, que l'on voit dans certaines archives du film.

Votre documentaire ouvre un champ de réflexion immense sur le masque, le double, la créature et son créateur. Quand avez-vous pris conscience que vous teniez avec Lady Vinsantos un sujet qui allait au-delà de la simple captation du réel ?

Très rapidement. Les Drag Queens/Kings sont des personnes qui aiment se mettre en scène et transgresser le réel. Et c'est d'ailleurs ce qui m'a immédiatement attirée vers Vinsantos et l'ensemble du projet : je voulais explorer cette frontière entre le réel et la fiction, sans doute motivée par mon expérience de scénariste. Je souhaitais montrer dans ce film comment Vinsantos et ces élèves créent un espace de fiction et de libertés, où ils peuvent devenir exactement la personne qu'ils ont envie d'être, au-delà du genre et autres facteurs sociétaux.

On a envie de savoir ce que sont devenus les élèves de Vince, en savez-vous plus ?

La pandémie a profondément transformé la scène artistique de la Nouvelle-Orléans, car la société Américaine, guidée par un capitalisme beaucoup plus sauvage que celui que nous connaissons, n'a pas offert d'aides aux artistes. Beaucoup étaient dans des situations économiques fragiles et ont dû déménager et se relocaliser ailleurs. De même, de nombreux clubs ont fermé. Mais la plupart continue à faire du Drag !

Le film aurait-il pu se passer dans une autre ville que La Nouvelle-Orléans ? Qu'est-ce qui fait de cette ville un lieu unique ?

Je ne crois pas que le film aurait pu se passer ailleurs, l'énergie créatrice de cette ville est incroyable. Il y a la musique d'abord, présente à tout moment. Et puis, cette architecture unique, née de l'influence de cultures si différentes. De plus, après Katrina, de nombreux artistes (comme Vinsantos) sont venus s'installer à la Nouvelle-Orléans, car la vie y était moins chère que dans des villes comme San Francisco ou New York. J'ai découvert la ville en 2013 et suis immédiatement tombée sous le charme. Le désir de faire ce film est né aussi bien de l'envie de faire un portrait de la ville, que de suivre Vinsantos et ses élèves.

publié le 21 février, Vincent Garnier, Allociné

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