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Ce film a secoué le Festival de Cannes en 2023 : récompensé, Tiger Stripes est à voir au cinéma

Lauréat du Grand Prix de la Semaine de la Critique au dernier Festival de Cannes, "Tiger Stripes" sort cette semaine au cinéma. Pourquoi ne faut-il pas manquer ce drame adolescent horrifique ?

Ça parle de quoi ?

Zaffan, 12 ans, vit dans une petite communauté rurale en Malaisie. En pleine puberté, elle réalise que son corps se transforme à une vitesse inquiétante. Ses amies se détournent d'elle alors que l'école semble sous l'emprise de forces mystérieuses. Comme un tigre harcelé et délogé de son habitat, Zaffan décide de révéler sa vraie nature, sa fureur, sa rage et sa beauté.

3 bonnes raisons de voir "Tiger Stripes"

Dix mois après son passage par la Croisette, le long métrage est visible dans nos salles à partir du 13 mars. Et voici les raisons de ne pas le manquer.

1 - Récompensé à Cannes

Son statut de section parallèle la met moins sur les feux des projecteurs que la sélection officielle et sa Compétition. Mais ce serait ignorer la vista de la Semaine de la Critique, où plusieurs pépites se sont faites remarquer. Comme, dernièrement, Rien à foutre, Nos cérémonies, About Kim Sohee ou encore Aftersun, dont le parcours s'est arrêté aux Oscars.

C'est aussi là, en 2023, qu'ont été découverts Vincent doit mourir, Le Ravissement et La Fille de son père, tous trois nommés pour la 49ème cérémonie des César. Sleep, récompensé à Gérardmer en début d'année. Et, donc, Tiger Stripes, qui a remporté le dernier Grand Prix de la Semaine de la Critique en date. Ce qui, vu la qualité en vigueur dans cette section, constitue un bel argument de poids.

2 - La puberté comme moteur de l'horreur

Premier long métrage réalisé par Amanda Nell Eu, cinéaste malaisienne, Tiger Stripes se situe au croisement du drame adolescent et du film d'horreur, la puberté de Zaffan (Zafreen Zairizal) s'accompagnant de phénomènes parfois surnaturels et incontrôlables, métaphore des changements que vit l'héroïne du récit et du regard porté sur elle.

De Ginger Snaps avec les loups garous à Teeth et son héroïne qui découvre que son vagin a des dents, en passant par Carrie au bal du diable, il n'est pas rare que le cinéma d'horreur et l'adolescence, en tant que sujet, fassent bon ménage. C'est également le cas de Grave de Julia Ducournau (lui aussi primé à la Semaine de la Critique), auquel on pense devant Tiger Stripes, tout autant qu'à Junior, drôle de court métrage de la future lauréate de Palme d'Or.

Avec une économie de moyens (qui donne aux rares effets spéciaux un petit aspect kitsch, là où les maquillages sont plus convaincants), le film d'Amanda Nell Eu s'inscrit dans la lignée des longs métrages cités plus haut. Et le fait de situer le récit en Malaisie lui permet de se démarquer.

3 - Horreur féministe

En Malaisie, 61,3% de la population sont musulmans et les personnages de Tiger Stripes font partie de cette majorité, dans une petite communauté rurale où toutes les femmes sont voilées et tenues de rester discrètes et à leur place. Un décor dans lequel le progressisme n'est pas de mise et où les changements de Zaffan sont vus avec dégoût ("Tu es sale maintenant", lui dit sa mère le jour de ses premières règles, avant qu'une camarade ne qualifie la situation de "dégueu").

S'inspirant tout autant du "Vilain petit canard" que de sa propre expérience et d'une puberté qu'elle a mal vécue ("J'étais mal dans ma peau, je détestais mon corps et j'étais terrifiée par tous ces bouleversements", dit-elle), la cinéaste orchestre une histoire de transformation et d'émancipation qui se dessine dès les premières secondes, lorsque Zaffan retire son voile et danse sur de la musique techno, brisant en privé les traditions auxquelles elle est soumise en public.

Une énergie qui se transformera en rage et en colère au gré des réactions face aux changements qu'elle traverse, dans une relecture inversée d'un mythe très populaire en Asie du Sud-Est : celui du tigre-garou qui se transforme en humain pour s'intégrer à la société. Tiger Stripes suit une héroïne qui retournera vers la nature, et le fait d'avoir choisi l'animal qui symbolise la force et le courage en Malaisie permet à la réalisatrice d'appuyer son propos féministe dans ce premier film singulier.

publié le 12 mars, Maximilien Pierrette, Allociné

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