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Une prestigieuse série notée 4,2 sur 5 a inspiré ce film intense avec Adèle Exarchopoulos et Gilles Lellouche

© Christophe Brachet - 2022 - CHI-FOU-MI PRODUCTIONS - TRESOR FILMS - STUDIOCANAL - FRANCE 3 CINEMA

A l'occasion de la sortie de "Je verrai toujours vos visages", voici cinq choses à savoir sur ce drame puissant signé Jeanne Herry ("Elle l'adore", "Pupille").

De quoi ça parle ? Depuis 2014, en France, la Justice Restaurative propose à des personnes victimes et auteurs d'infraction de dialoguer dans des dispositifs sécurisés, encadrés par des professionnels et des bénévoles comme Judith, Fanny ou Michel.

Nassim, Issa et Thomas, condamnés pour vols avec violence, Grégoire, Nawelle et Sabine, victimes de homejacking, de braquages et de vol à l'arraché, mais aussi Chloé, victime de viols incestueux, s'engagent tous dans des mesures de Justice Restaurative.

Sur leur parcours, il y a de la colère et de l'espoir, des silences et des mots, des alliances et des déchirements, des prises de conscience et de la confiance retrouvée... Et au bout du chemin, parfois, la réparation...

Références prestigieuses

Jeanne Herry avait pour référence le célèbre film de procès 12 hommes en colère (1957) de Sidney Lumet. Mais aussi En thérapie, la série d'Olivier Nakache et Éric Tolédano. La cinéaste raconte : "Elle m'a beaucoup plu et aussi rassuré : à ce stade, même si je ne le souhaitais pas, je me posais encore la question de mettre ou non en scène les agressions dont les victimes avaient fait l'objet."

"Devait-on voir Sabine (Miou-Miou) se faire voler son sac ? Son récit suffirait-il ? « En thérapie » m'a confortée dans ce que voulais faire. Les visages de la série étaient comme des paysages : on se faisait nous-mêmes nos propres images. On peut faire confiance aux mots et au jeu. Je me suis concentrée sur le plaisir et la perspective de voir mes acteurs jouer."

Naissance du projet

Créée en 2014, la justice restaurative est un espace de dialogue de nature à offrir aux personnes impliquées, qui souffrent des répercussions du crime, la possibilité de se rencontrer pour en questionner le « pourquoi » et le « comment ». Après Pupille, Jeanne Herry cherchait un nouveau projet et a entamé des recherches sur deux sujets qui l'intéressaient : le fonctionnement du cerveau et le milieu de la justice.

"J'ai toujours été passionnée par les faits divers, les procès, les grandes figures du banditisme, les ténors du barreau... Un jour, je suis tombée par hasard sur un podcast autour de la justice restaurative. Ça m'a intriguée, puis captivée : ce qui m'intéressait dans ce processus était précisément ce qui motivait mes recherches sur le cerveau : la réparation", se rappelle la réalisatrice, qui signe son troisième long métrage.

Vols avec violence

Jeanne Herry a rapidement décidé de mettre en scène des rencontres détenus-victimes autour des vols avec violence. Une problématique sociale et sociétale assez banale, mais dont on mésestime les effets ravageurs sur les victimes. La réalisatrice confie :

"Les violences intrafamiliales n'ont pas de frontières sociales, elles frappent tous types de familles, de quartiers, de classes... Ce sont des guerres sourdes qui ont lieu derrière les murs des maisons, nos maisons, chacun peut s'identifier, se projeter."

"Je me suis à nouveau longuement documentée, et j'ai voulu raconter un frère agresseur, une soeur victime et la famille qui avait généré cela. La violence, l'amour, la prise de pouvoir, les manques et les manquements... Des drames effroyables et courants."

Se documenter

Dans Pupille et Je verrai toujours vos visages, Jeanne Herry éclaire un endroit du réel peu connu qui propose des outils porteurs d'espoir. Pour autant, la cinéaste ne fait pas ces films pour parler de l'adoption ou de la justice restaurative :

"Ce ne sont pas des documentaires. Le fond me touche, mais c'est d'abord le cinéma qui m'importe. Ce sujet, je le choisis car je pressens que je vais pouvoir y planter des graines de romanesque et qu'il va m'offrir la possibilité de faire un bon film."

"Au cours de mes recherches, un des interlocuteurs que j'ai rencontré m'a dit : « L'objectif de la justice restaurative, c'est la libération des émotions par la parole ». C'est cette libération que j'ai voulu mettre en scène", précise-t-elle.

Un casting de folie !

Jeanne Herry a écrit le film en ayant en tête certains acteurs comme sa mère Miou-Miou (Sabine), Elodie Bouchez (Judith), Gilles Lellouche (Grégoire), Leïla Bekhti (Nawell) et Jean-Pierre Darroussin (Michel). La réalisatrice se rappelle :

"Je n'étais pas sûre que le rôle intéresserait Gilles - après tout, son personnage n'arrive qu'à la cinquantième page-, je ne connaissais pas Leïla Bekhti. Pour moi, c'étaient des boussoles, c'était agréable d'avancer avec eux en tête."

"J'ai très vite pensé à Birane Ba pour le rôle d'Issa. Je l'avais trouvé très inspirant en travaillant avec lui sur un spectacle à la Comédie française. Alors qu'il y a peu de personnages jeunes dans mes films, Il m'a donné envie d'en imaginer un."

"Il est formidable, Birane, solaire, très fiable, il cherche beaucoup. Sont venus ensuite Suliane Brahim avec qui j'avais travaillé aussi, Adèle Exarchopoulos, Dali Benssalah et Fred Testot."

publié le 2 avril, Laurent Schenck, Allociné

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