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Vortex sur France 2 : "L'argument fantastique est utilisé pour créer des situations émotionnelles très fortes" révèle Slimane-Baptiste Berhoun, le réalisateur

© Louis-Adrien Le Blay/FTV

Alors que la mini-série "Vortex" continue ce soir sur France 2, Slimane-Baptiste Berhoun, son réalisateur, se confie sur sa vision de ce polar pas comme les autres.

Ce soir, France 2 diffuse la suite de sa série évènement Vortex. L'occasion pour Slimane-Baptiste Berhoun, son réalisateur, de se confier à notre micro sur sa vision de ce polar pas comme les autres.

Allociné : Comment êtes-vous arrivé sur le projet Vortex ? 

Slimane-Baptiste Berhoun : Je suis arrivé sur Vortex après avoir travaillé sur la série Mental pour France TV Slash qui a attiré l'attention d'Iris Bucher et Roman Turlure de Quad. Ils m'ont fait passer un casting de réalisateur. On ne le sait pas assez mais les réalisateurs passent aussi des castings. Ce casting consistait à lire les deux premiers épisodes et exprimer ma vision du projet, ma sensibilité, ma compétence technique sur la faisabilité, ma lecture de la trame émotionnelle mais aussi de trouver l'équilibre entre le polar, le fantastique, la technologie, les effets spéciaux et l'histoire d'amour qui était au centre de l'histoire. 

Qu'est-ce qui vous a séduit à la lecture du scénario ? 

C'est un tout. L'élément de base, sans lequel il n'y a rien, c'est quand même l'histoire et les émotions. Qu'est-ce qu'on va aller chercher chez les comédiens et les personnages ? Comment on va faire vibrer un spectateur. J'ai tout de suite vu dans Vortex que l'argument fantastique était vraiment utilisé pour décupler les dilemmes et pour créer des situations émotionnelles très fortes. Dans mon travail, même si j'ai un côté technicien et très geek, ce qui m'anime tous les jours c'est d'aller parler avec les comédiens. C'est d'écouter le texte, d'aller chercher les émotions. Dans Vortex, j'ai senti qu'il y avait un cœur émotionnel très fort et qu'on allait pouvoir travailler quelque chose de précis et de beau. 

Je trouve que c'est une série qui raconte quelque chose, qui nous questionne et qui peut parler à tous. Comment on fait pour aimer plusieurs personnes ? Comment on fait pour arrêter d'aimer ? La série nous interroge également sur le deuil. C'est vraiment le cœur de la série et le moment où je me suis dit "cette série peut vraiment être super". 

Après, j'ai lu la première page et j'ai vu dans le ton des scénaristes qu'il y avait quelque chose qui me parlait. Il y avait une fibre comédie à exploiter aussi. Il y avait une fraicheur et une modernité. Il y avait quelque chose vraiment très efficace où je me suis dit que je pouvais faire partie de l'ADN de cette écriture. 

Et puis, je suis un fabricant d'images. J'aime beaucoup le travail de la lumière, de la caméra, de la technique. J'adore les effets spéciaux. Il y avait donc en plus cette satisfaction de technicien d'aller fabriquer des choses qui n'existent pas. De se poser des questions de fabrication qu'on ne se pose jamais : comment vieillir et rajeunir les gens ? Comment filmer cette aventure sur une plage en Bretagne sachant qu'il faut que ce soit à la fois virtuel et réel ? 

La première séquence sur la plage où Ludo retrouve le cadavre, c'est un peu le pivot de toute la direction artistique de la série puisque c'est cette scène qui va être filmée par les drones. Et c'est cette vidéo de drone qui va revenir à chaque fois qu'il sera dans le vortex. Ça veut dire que la météo de cette scène va être la météo du vortex pour les quarante séquences qui suivent. Comme on pouvait travailler la météo avec les effets spéciaux, on a donc choisi avec le chef opérateur une golden hour au milieu des nuages. C'est ça qui donne la direction artistique de la série jusqu'à l'affiche. Il nous a fallu quatre demi-journées de soleil découvert pour ensuite pouvoir rajouter les nuages en post-production. Tout ça, ça a été une sorte de satisfaction technique et artistique. 

La technologie utilisée dans Vortex était-elle déjà actée dès le début du projet ou était-ce votre proposition ?

C'est quelque chose qui avait déjà été pré-identifié par la production et les équipes de Fix Studios qui sont internes à Quad. Ils avaient déjà un peu prospecté et proposé cette solution à Iris Bucher et Roman Turlure, les producteurs, qui l'avaient validée. Mais ça a aussi été soumis à mon approbation et j'ai trouvé que c'était une bonne idée. 

C'est la première fois que vous utilisiez cette technologie ? 

Oui. C'est une technologie qui est très utilisée en rouling mais qui est rarement utilisée pour faire autant de séquences. C'est vrai que dans Vortex, il y a plus d'une quarantaine de séquences qui sont entièrement faites en production virtuelle mais ce n'est pas toujours la même. L'élément pivot de ça, c'est que Ludovic (Tomer Sisley) ne peut jamais prendre le vent quand il rencontre Mélanie (Camille Claris) sur la plage parce qu'il est dans une salle de réalité virtuelle. Et ça, ça fait partie du respect de l'univers fantastique qu'on s'était imposé. Donc quand on est avec lui dans cette salle de réalité virtuelle, Mélanie prend le vent mais pas lui. Par contre, quand on est avec elle sur la plage, il peut faire nuit et même pleuvoir parce qu'on n'est pas dans la réalité virtuelle. 

Qu'on soit du côté virtuel de Ludovic ou photoréaliste de Mélanie, Tomer ne pouvait pas prendre le vent. Et ça, ça implique de changer la technologie utilisée dans le mur de LED. Un coup ça va être de la 3D, un coup ça va être des plates pour être vraiment sur quelque chose qui a été filmé sur plage. Ça nous demandait donc une gymnastique séquence par séquence pour savoir quelle technologie utiliser en fonction du point de vue dans lequel on se trouvait afin que personne ne se pose la question.

Quand on dit dans Vortex qu'il y a 450 plans truqués, ce qui est une montagne à l'échelle d'une série comme ça, ce qui me satisfait vraiment c'est qu'on me dise "ah bon ?! ok!".  Ce que je veux, c'est que l'histoire d'amour fonctionne et qu'on ne se pose pas la question. Il n'est pas question qu'on fasse de la démonstration. De la même manière, je ne voulais pas qu'on soit ridicules mais hyper exigeants. Il y a des plans qui existent en version 47, ça veut dire que les personnes de la VFX ont fait 47 versions avant qu'on la valide. 

Vortex, c'est un projet qui permet à chaque département d'exprimer son art. Il y avait un enthousiasme inter-départements que l'on retrouve dans le produit final. En définitive, on nous dit pas que les VFX sont ridicules, ils sont bien et dans la bonne qualité mais on n'a pas non plus été chercher le côté démonstratif du style "regardez on a fait du rajeunissement numérique". On a voulu que tout cela s'efface derrière l'histoire d'amour et les émotions. 

Comment crée-t-on la "tension émotionnelle" dans une série comme Vortex ? 

Je ne sais pas si je fais de la tension émotionnelle. Ce que j'essaie de faire, c'est quelque chose de juste. A la lecture du texte, j'écoute comment ça sonne, j'écoute les besoins des comédiens pour que l'émotion s'exprime naturellement dans leurs corps. Et si le parcours émotionnel tel qu'il est prévu par la séquence ne fonctionne pas, on travaille avec le comédien ou on change la nature de certaines répliques pour obtenir ce dont on a besoin. C'est vraiment un travail d'écoute avec le comédien. L'une de mes grandes satisfactions, c'est de voir la différence entre la première prise et la prise qui est montée. Celle où on est allé chercher quelque chose qui n'était pas accessible de prime abord mais qu'on va faire naître dans chaque séquence. Pour moi, c'est vraiment le cœur de mon métier. 

Est-ce qu'il y a des choses que vous avez modifiées dans le scénario ?

J'ai ajouté de la comédie. C'est quelque chose que j'aime beaucoup. Pour une bonne histoire, il faut qu'il y ait du contraste dans les émotions. La partie drame, on l'avait très forte mais on avait besoin de quelque chose de plus léger. Le personnage d'Agathe (Juliette Plumecocq-Mech), je l'ai vraiment refabriqué avec Juliette. A la base, Agathe était un personnage beaucoup plus jeune et je trouvais ça intéressant que la responsable VR soit la doyenne du commissariat. Je trouvais ça plus original. J'en ai parlé avec les auteurs qui étaient d'accord.

J'ai rencontré Juliette, on a retraversé les textes d'Agathe et on s'est fait une sorte de ping-pong de punchlines. Et elle a compris le personnage pince sans rire que je voulais en faire. On s'est retrouvés là-dessus et les gens sur le plateau étaient mort de rire. Ça marche hyper bien. J'étais très content de voir les auteurs se marrer en découvrant les rushs. On a besoin du personnage d'Agathe. On la voit très peu mais à chaque fois qu'on la voit elle score. C'est quelque chose dont je suis assez fier. Quand on regarde le premier épisode de Vortex, on ne s'attend pas à cette dimension comique. Et je trouve qu'elle rajoute à la palette de la série. 

 

publié le 9 janvier, Jennifer Radier, Allociné

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