Sierra Torride : "Je suis consterné", quand le scénariste reniait le film
Le scénario du western "Sierra Torride" a beaucoup évolué au fil du temps, au point de tellement changer qu'il est renié par l'auteur de l'histoire originale, qui s'est dit "consterné".
Sierra Torride est un western sorti en 1970 alors que Clint Eastwood tourne aux Etats-Unis depuis 4 ans et son retour d'Italie où il a tourné la "trilogie du dollar" pour Sergio Leone. Il sort d'un échec cuisant (le western chantant La Kermesse de l'Ouest) et d'un vrai succès (le film de guerre Quand les aigles attaquent).
L'acteur n'est pas le premier choix pour Sierra torride, western surfant sur l'esthétique des films de Leone au point que Eastwood porte le même ceinturon que dans les trois films qu'il a tourné en Italie). Le film a été écrit comme une suite de Dieu seul le sait, avec Robert Mitchum et Deborah Kerr. Il en sera au final tout autrement, sous la houlette du réalisateur Don Siegel, qui connait bien Eastwood, et à qui Sierra torride est confié.
L'histoire originale est rédigée par Budd Boetticher, connu pour la réalisation de superbes westerns avec Randolph Scott et qui voit son travail réécrit par Albert Maltz (La Cité sans voiles, Cape et poignard). Une expérience qui a laissé un souvenir amer à Boetticher qui s'en était fait l'écho dans la presse française, lorsqu'on lui demandait s'il était mécontent du film :
Pas mécontent, simplement consterné. Je suis un grand amateur de Don Siegel, mais il a commis une erreur en ce qui me concerne. Et il détaille :
"Il m'avait invité à une projection de Sierra torride, qui devait être une histoire d'amour - mon premier film "tendre", et voyez ce qu'il en a fait. Il m'appelle le lendemain matin pour me remercier de n'être pas sorti de la salle avant la fin. 'Don, comment as-tu pu faire un tel film ?' Il me répond : 'C'est une chose si merveilleuse de se lever le matin en sachant qu'on trouvera un chèque dans la boîte chaque semaine' !"
Son producteur était un imbécile. "Je crois qu'il vaut mieux se regarder dans la glace et ne pas avoir honte de ce que l'on voit en se rasant. Mais ce n'était pas tout à fait la faute de Don, son producteur était un imbécile. De fait, je pourrais tourner aujourd'hui ma version de Sierra torride : personne ne la reconnaîtrait."
L'année suivante, Eastwood accepte de tourner De l'or pour les braves pour retrouver Don Siegel, qui ne fera finalement pas le film, justement bloqué sur la post-production de Sierra torride, qui sortira un mois APRES De l'or pour les braves, pourtant tourné après.
publié le 20 novembre, Corentin Palanchini, Allociné
