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Shining : pourquoi Jack Nicholson voulait absolument écrire cette fameuse scène

Classique absolu de l'épouvante que l'on ne présente plus, le "Shining" de Stanley Kubrick regorge de scènes mémorables. Dont l'une, qui fut co-écrite par Jack Nicholson lui-même, avec la bénédiction du maître...

L'écrivain Jack Torrance, ancien alcoolique, accepte un emploi de gardien d'hiver d'un hôtel niché en haut des Rocheuses, isolant ainsi sa femme, leur jeune fils aux pouvoirs psychiques, et lui-même, du reste du monde jusqu'au printemps suivant.

Cependant, lorsque la première tempête de neige bloque la seule route menant à l'hôtel, l'énergie néfaste et maléfique héritée des drames survenus dans l'hôtel par le passé ressurgit. Et fait doucement mais inexorablement sombrer Jack Torrance dans la folie...

Evidemment, à la lecture de ces quelques lignes, vous avez forcément reconnu l'histoire de Shining, le chef-d'oeuvre de Stanley Kubrick. Sous les traits du gardien Torrance, Jack Nicholson se révèle monstrueusement génial. C'est non seulement un des personnages les plus iconiques de sa riche carrière, mais sa portée a depuis largement dépassé le simple cadre du film, faisant de lui un des personnages les plus terrifiants jamais vu à l'écran.

A sa sortie pourtant, Shining a reçu des critiques plutôt tièdes et même deux citations aux Razzie Awards (pire actrice pour Shelley Duvall et pire réalisateur). Parce qu'il ne s'agit pas d'un film comme les autres, il a donc fallu du temps et de la réflexion pour l'appréhender comme le chef d'oeuvre incontournable qu'il est.

Nicholson met la main à la pâte

Il se trouve que l'une des scènes mémorables du film fut co-écrite par Jack Nicholson lui-même, comme un écho à une situation personnelle délicate vécu à un moment de sa vie. Quelle scène en l'occurrence ? Celle où Wendy vient le voir dans le grand hall du salon Colorado, où Jack s'est installé avec sa machine à écrire.

La tension est très palpable dans la scène. Plus Wendy lui pose des questions, plus Jack, d'un tempérament irascible cachant mal ses vieux démons qui le hante, n'a aucune envie de répondre, balançant, agacé, des réponses en un seul mot. "Ne soit pas si grognon !" lui lance sa femme. Il explose :

- Wendy, je vais t'expliquer quelque chose... Toutes les fois que tu entres ici, tu m'interromps, tu perturbes ma concentration, tu me fais perdre le fil et il me faudra du temps pour reprendre là où j'en étais !!! Tu saisis ?

- Oui...

- On va établir une nouvelle règle. Quand je suis ici, que tu m'entendes taper, ou que tu ne m'entendes pas taper, quoi que je sois en train de foutre ici, ca veut dire que je travaille. Ca veut dire "n'entres pas". Est-ce que tu peux te mettre ça dans la tête ?

- Oui...

- Bien ! Alors pourquoi ne pas commencer tout de suite et foutre le camp d'ici ?

La scène, en vidéo...

Dans cette scène, Jack Nicholson montre que son personnage est déjà en train de bouillir intérieurement, et qu'il ne suffit de pas grand chose pour le faire exploser. Dans une très longue et passionnante interview que l'acteur avait accordé au en juillet 1986, Nicholson révélait qu'il avait lui-même écrit cette scène, en s'appuyant sur le vécu de son divorce d'avec sa femme pour façonner la frustration de son personnage vis-à-vis de Wendy. Nicholson fut en effet marié avec Sandra Knight, et avait divorcé en 1968, après six ans de mariage.

"J'étais sous la pression d'être un père de famille avec une fille. J'ai accepté un travail pour jouer dans un film le jour, et le soir j'écrivais un film. J'étais dans mon petit coin [en train d'écrire] et ma femme bien-aimée, Sandra, est entrée et s'est retrouvée confrontée à ce maniaque. J'ai parlé à Stanley de ce souvenir, et nous avons écrit cette scène".

Racontant l'anecdote au journaliste en prenant la voix de son personnage de Jack Torrance, il ajoute : "Je me revois assis derrière mon bureau, lui dire "même si tu ne m'entends pas taper, ca ne veut pas dire que je n'écris pas !" Je me souviens de cette animosité folle que j'avais. Et bien, j'ai fini par divorcer".

publié le 23 mars, Olivier Pallaruelo, Allociné

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