Actus cinéma

Desert Dancer : rencontre avec le danseur Afshin Ghaffarian

Reece Ritchie et Freida Pinto dans Desert Dancer

© Senator Filmverleih, Allocine

Corps-à-corps saisissant entre la répression iranienne et l'expression physique, Desert Dancer, ode à la liberté en salles ce 6 janvier, romance l'histoire du danseur iranien Afshin Ghaffarian, exilé politique à Paris depuis 2009, année du soulèvement postélectoral qui suivit la réélection du président Mahmoud Ahmadinejad. Rencontre avec le héros du biopic, qui poursuit son art dans la Ville Lumière.

Début 2010, un an après son arrivée en France, Afshin Ghaffarian reçoit un e-mail du réalisateur Richard Raymond, qui signe ici son premier long-métrage : "Cet email disait qu'il avait lu un article sur mon histoire dans le Times et qu'il était intéressé pour l'adapter au cinéma" confie le danseur. Reçu à Paris par le cinéaste britannique et le scénariste Jon Croker, l'Iranien se livre alors à une série d'interviews, supports de travail que l'équipe du film utilisera pour construire le biopic, qui naîtra sur les écrans de cinéma quatre ans plus tard, avec pour tête d'affiche l'acteur Reece Ritchie (Hercule) dans le rôle d'Afshin Ghaffarian, ou encore Freida Pinto (Slumdog Millionaire) et Tom Cullen (Downton Abbey). Passé par une école de cinéma, d'où il ressort diplômé en 2003, Afshin Ghaffarian découvre la danse contemporaine peu de temps après, par le biais du metteur en scène polonais Jerzy Grotowski, alors qu'il étudie le théâtre à l'université de Téhéran : "Il mettait le corps du comédien au centre de la création théâtrale. Ça a été la porte d'entrée pour moi, pour découvrir ce qu'on appelle la danse contemporaine. Je me suis aussi servi d'Internet, j'ai regardé des vidéos pour m'inspirer", se souvient-il. Naîtront ensuite de nombreuses performances corporelles, dont le fameux spectacle clandestin joué dans le désert iranien et chorégraphié dans le film par le britannique Akram Khan, célèbre pour avoir oeuvré sur la cérémonie d'ouverture des Jeux Olympiques de Londres en 2012.

À travers ses personnages de danseurs asphyxiés par des hordes de Basij, ces policiers de la moralité qui ne tolèrent aucun faux pas, Desert Dancer embarque le spectateur dans un pays où la danse est synonyme de pêché. Dans la réalité, la discipline artistique est pourtant pratiquée par les Iraniens, mais ces derniers doivent se soumettre à quelques pirouettes linguistiques pour l'appréhender : "La question de la danse est compliquée en Iran. Pas la danse elle-même, plutôt les mauvaises connotations qui pèsent sur elle, mais ça ne veut pas dire que la danse n'existe pas en Iran. Il y a beaucoup de traditions populaires (...) et même davantage de danses sociales en Iran qu'en France par exemple. Même dans le milieu officiel, la danse existe mais en revêtant d'autres noms, celui de théâtre physique, ou par exemple, dans le cas de la danse hip-hop, sous le terme de sport aérobique, et gymnastique rythmique pour le ballet" nous précise-t-il.

Aujourd'hui, l'Iranien confie vouloir partager son expérience par le biais de ses spectacles, montés au sein de la compagnie des Réformances (contraction de réforme et de performances) qu'il a créée en 2010. "Le film suit nécessairement une logique dramatique, moi j'essaye d'avoir une logique plus critique sur ma propre vie, mon expérience, ces deux logiques ne suivent pas le même chemin", déclare-t-il aujourd'hui, cinq ans après avoir accepté de voir sa vie exposée sur grand écran. "Quand je danse, je me sens libre et ça, personne ne peut me l'enlever", clame le personnage d'Afshin Ghaffarian au cours du film : désormais, cette liberté, plus personne ne pourra lui enlever, gravée à tout jamais dans le 7ème art.

publié le 6 janvier, Marie Ponchel

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