Actus cinéma

Coma : Bertrand Bonello livre un film fascinant sur le réchauffement climatique avec la voix de Gaspard Ulliel

Bertrand Bonello (Nocturama, Zombi Child, Saint Laurent) revient avec "Coma", son nouveau film inspiré du confinement avec Julia Faure, Louise Labeque et les voix de Gaspard Ulliel et Laetitia Casta.

Cette semaine sortent en salles les deux derniers longs métrages auxquels a participé le regretté Gaspard Ulliel. Dans le drame Plus que jamais de Emily Atef, l'acteur donne la réplique à Vicky Krieps, dans Coma de Bertrand Bonello il prête sa voix à Scott, une poupée qui reprend les tweets les plus délirants de Donald Trump.

Le comédien a déjà collaboré avec le metteur en scène pour Saint Laurent en 2015 et devait être la tête d'affiche de son projet La Bête avec Léa Seydoux.

Laetitia Casta, Louis Garrel, Anaïs Demoustier et Vincent Lacoste prêtent également leurs voix aux poupées de l'héroïne de cet étrange et fascinant objet cinématographique.

Dans Coma, une adolescente (Louise Labeque) a le pouvoir de nous faire entrer dans ses rêves et ses cauchemars. Enfermée dans sa chambre à cause du dérèglement climatique, son seul rapport au monde extérieur est virtuel. Elle navigue entre fiction et réalité, guidée par une youtubeuse inquiétante et mystérieuse, Patricia Coma (Julia Faure).

Le film débute par un prologue présentant des images confuses et un texte du réalisateur en hommage à sa fille Anna.

Cette vidéo d'introduction est extraite du court-métrage "La Première lettre à ma fille" réalisé par Bertrand Bonello durant le confinement à la demande de la Fondation Prada. Cette dernière a passé commande à plusieurs cinéastes de courts métrages dont le thème était : "Comment faire un film sans tourner ?".

Un film pour la jeunesse contemporaine

Bertrand Bonello explique dans le dossier de presse du film : "Cela appelait évidemment à une réflexion sur l'archive, qui était passionnante mais vertigineuse, en termes de possibilités. J'ai eu l'idée d'y répondre sous la forme d'une lettre adressée à ma fille Anna, âgée de 18 ans, et adressée au-delà d'elle à la jeunesse contemporaine."

Le metteur en scène a donc utilisé des images de son film Nocturama (2016), déjà dédié à sa fille et l'a sous-titré avec les qu'il souhaitait dire à Anna.

Il explique :  "J'ai utilisé des images de Nocturama dans lesquelles j'ai zoomé. Cela m'a semblé faire sens, Nocturama étant déjà un film sur la jeunesse. Il se trouve que ce court métrage a suscité de nombreux retours émus. J'ai donc eu l'envie de le prolonger. Et comme le film qui devait alors être mon prochain était décalé d'un an et qu'il s'agit d'un lourd projet, j'ai voulu faire un film de manière différente, plus libre (...). Ce court métrage, La Première lettre à ma fille, est donc devenu le prologue de Coma."

Bertrand Bonello devait en effet mettre en scène la romance de science-fiction La Bête avec Léa Seydoux et Gaspard Ulliel, mais le tournage a été décalé une première fois en raison de la pandémie de Covid et ensuite à cause du décès tragique de Gaspard Ulliel, survenu le 19 janvier 2022. Ce dernier a été finalement remplacé par l'acteur anglais George MacKay.

Gilles Deleuze comme point de départ

Le film débute par un plan sur l'héroïne du film incarnée par Louise Labeque (déjà vue dans Zombi Child de Bertrand Bonello). Seule dans sa chambre aux murs recouverts de photos de films, de groupes de musique et d'amies, cette dernière regarde les vidéos d'une étrange youtubeuse : Patricia Coma (Julia Faure).

Un extrait de discours de Gilles Deleuze mettant en garde contre le rêve de l'autre résonne alors comme une alerte pour le spectateurs qui va plonger dans les rêves et les cauchemars de l'héroïne confinée.

Bertrand Bonello explique d'ailleurs que la mise en garde du philosophe français a été un des points de départ à son film. "Cette phrase m'a libérée. J'ai eu envie qu'elle soit dans le film. Mais surtout, j'ai eu envie de désobéir à Deleuze en faisant justement un film qui entre dans le rêve d'une jeune fille. Et dans le rêve d'une jeune fille d'aujourd'hui. Qui devient évidemment un cauchemar. À partir de là, tous les dispositifs devenaient possibles."

Plusieurs dispositifs

Et entre 2 visionnages de vidéos Youtube et discussions zoom sur les serial-killers, la jeune fille se laisse aller à des divagations. Cette dernière imagine des discussions dignes d'un soap opera avec ses poupées doublées par Laetitia Casta, Vincent Lacoste, Gaspard Ulliel, Louis Garrel et Anaïs Demoustier.

Ces scénettes sont disséminées tout au long du film, entre les vidéos de Patricia Coma, des tutos pour faire de la soupe, des interviews de serial-killer, un bulletin météo avec des températures hallucinantes ou encore des cauchemars en forêt dans la "free zone". Un espace effrayant dans lequel on peut être soi même.

En utilisant différents dispositifs, tels que la chaîne YouTube, les poupées animées en 3D, le dessin animé, les Zooms, les FaceTime, et les images internet, Bertrand Bonello parvient à rendre vivant et innovant ce film sur le confinement tourné en 12 jours.

Malgré le fait qu'il aborde des sujets graves, Coma le fait avec un certain humour. Le réalisateur explique d'ailleurs : "Certains dispositifs, comme la chaîne YouTube ou l'animation, permettent un premier degré et une manière de dialoguer qu'on ne pourrait pas faire dans des scènes classiques. Je tenais à cet humour, comme je tenais à ce que le film ait un côté très « pop », voire sexy, malgré la tonalité sombre de ce qu'il raconte."

On se laisse happer par ce film étonnant dont le propos devient limpide au fur et à mesure : entre enfermement, solitude, réseaux sociaux et réchauffement climatique, l'humanité va peu à peu sombrer dans la folie. 

publié le 16 novembre, Laëtitia Forhan, Allociné

Liens commerciaux