Actus cinéma

Cinq interviews de stars ultra gênantes

© Channel 4 News / Capture écran YT

Humour malvenu, boulettes du journaliste qui confond les noms, questions sexistes ou intimes totalement déplacées, acteurs ou réalisateurs mal lunés en service minimum... Retour sur cinq promos cinéma qui ont dérapé.

Les talents de cinéma ont beau être particulièrement rôdé à l'exercice des interviews, plus ou moins longues et quel que soit le format, il arrive aussi que la promotion d'un film (ou autre d'ailleurs, ce n'est pas exclusif...) vire au chemin de croix. Pour l'artiste, ou pour la personne qui mène l'interview.

Entre humour malvenu, questions sexistes ou totalement déplacées voire carrément stupides, acteurs ou actrices mal lunés en service minimum dès le départ, obligeant le ou la journaliste à sortir les avirons et ramer à n'en plus finir... L'exercice de la promotion devient parfois un calvaire. La preuve par cinq.

Jonah Hill et la promotion de "War Dogs" en France

"Je suis content d'être venu. Je ne suis vraiment pas venu pour rien. Etre ridiculisé par une journaliste locale, ça fait plaisir..." Jonah Hill garde un sourire de façade mais le malaise était palpable. Invité sur le plateau du Grand Journal le 9 septembre 2016 pour promouvoir la comédie War Dogs, le comédien américain était confronté à la Miss Météo de l'époque, Ornella Fleury.

Tout commence par un résumé ouvertement décalé de la carrière de l'acteur, qu'on sent de plus en plus tendu au fil des traits d'humour de la chroniqueuse : "Je suis vraiment impressionnée d'être en face de vous ce soir. En fait, je suis un peu amoureuse de vous. La première fois que je vous ai vu, c'était dans Supergrave, et vous aviez du sang de règles sur les genoux. Et là je me suis dit... 'Il me plaît ce garçon, il me plaît".

Ensuite je vous ai vu vous masturber devant 200 personnes dans Le Loup de Wall Street. Et là j'ai pensé 'Wahou, ça c'est un mec pour moi, vraiment'. Mais vraiment, c'est quand je vous ai vu vous faire sodomiser par un démon de trois mètres dans This is the end que je me suis dit 'ça c'est l'homme de ma vie !" Ce à quoi l'acteur répond un lapidaire "Et vous, vous vous faites sodomiser assez souvent, j'ai entendu, non ?" Son partenaire, Miles Teller, semble, lui, clairement mal à l'aise.

Avant de lancer sa météo, Ornella Fleury ajoute : "Du coup j'ai un fantasme avec vous, Jonah. Ce serait qu'on se retrouve tous les deux dans une chambre d'hôtel le soir. On discute, vous me faites rire, vous me faites beaucoup rire... Et là d'un coup, vous ramenez vos potes DiCaprio et Brad Pitt... et vous partez". Rire du public, mais rire jaune du comédien, malgré le "I love you" final de la demoiselle qui avait lancé en ouverture de sa chronique "Chez nous, la météo est censée être drôle. Dans le doute, riez."

Alors propos déplacés de la part de la Miss Météo ou manque d'humour du comédien américain ? Chacun a eu son avis sur la question, alors que l'acteur avait annulé dans la foulée l'essentiel de ses entretiens prévus dans le cadre du Festival de Deauville où le film devait être présenté en clôture de la manifestation.

Décision que de nombreux journalistes attribuèrent à cette séquence gênante sur l'antenne de Canal+. Cela n'a pas empêché le comédien de participer au photocall et à la conférence de presse sur place, avant d'être très applaudi par les festivaliers en montant sur la scène du CID.

Revoici la séquence 100% malaise, ci-dessous...

Le 12 septembre 2016, Ornella Fleury avait tenu à revenir sur l'incident et à présenter ses excuses face caméra, alors que Laurent Ruquier et Chantal Ladesou étaient les invités du Grand Journal : "En temps normal, j'aurais vraiment consacré mes deux minutes pour vous dire à quel point je vous trouve tous les deux drôles et brillants. Mais là c'est un peu particulier. (...) Alors je vous explique, on a reçu Jonah Hill vendredi dernier. Un acteur américain que j'adore vraiment profondément. Mais ça ne s'est pas très bien passé. Je vous explique le truc.

Vous voyez dans La Cité de la Peur quand Dominique Farrugia explique : 'Quand je suis content je vomis ?' Moi c'est pareil, mais je vomis des blagues. Du coup, si vous le permettez, je vais juste m'adresser à Jonah : le problème, Jonah, c'est que moi je vis avec toi depuis dix ans à travers tes films. Mais ce à quoi je n'avais pas pensé vendredi, c'est que toi, pas du tout !

En fait Jonah, j'ai tellement l'impression de te connaître que, vendredi dernier, je pensais déconner avec un pote, mais la réalité, c'est qu'on n'est pas potes. La réalité, c'est que tu as deux nominations aux Oscars, et moi j'ai deux vidéos sur mon compte Youtube. Toi tu as tourné avec Scorsese et Tarantino, moi je me suis faite recaler d'une pub pour Spontex. Ils ont préféré prendre un hérisson. Heureusement pour moi, j'ai fini par réussir le casting de la météo [...]"

Robert Downey Jr sur "Avengers : l'ère d'Ultron"

Avril 2015. L'équipe du film Avengers : l'ère d'Ultron est en pleine tournée promotionnelle pour le film, à grand renfort d'interviews de type "Junket"; c'est à dire le plus souvent de courtes interviews qui ne dépassent pas la poignée de minutes. Dans cet exercice, il est bien rare que le talent interviewé évoque un sujet autre que le film, comme l'a appris à ses dépens le journaliste américain Krishnan Guru-Murthy, de Channel 4 News, avec l'acteur Robert Downey Jr, pourtant réputé très cool en interview.

Il faut dire que le journaliste a été particulièrement maladroit, pour ne pas dire totalement déplacé, et traîne d'ailleurs dans son sillage quelques bonnes casseroles à ce sujet, comme avec Tarantino. Il se risque ainsi à évoquer le passé tumultueux de l'acteur, notamment ses relations orageuses avec son père, et son détour par la case prison...

L'acteur recadre habilement et gentiment le journaliste, en lui lançant un "On est en train de faire la promotion d'un film ?" Tendu mais toujours pro, Downey Jr lui confirme qu'il aura le même temps d'interview que ses autres collègues journalistes.

Le journaliste n'a pourtant pas saisi la perche, continuant d'embrayer sur les anciens problèmes d'alcool et de drogue de l'acteur. Excédé, l'acteur lui lance un "Désolé mais qu'est-ce qu'on fait là... Bye !", laissant le journaliste totalement incrédule, seul dans la pièce.

UN K.O debout (assis plutôt, pour le journaliste), à déguster ci-dessous...

Christoph Waltz sur "The Green Hornet"

"Une interview mal préparée face à un acteur mal luné donne forcément un mauvais sujet" écrivait le , alors qu'il a eu en 2011 en interview l'acteur Christoph Waltz, qui joue le méchant dans The Green Hornet.

Le journaliste a en effet eu la mauvaise idée de faire un clin d'oeil à son génial personnage de Hans Landa dans Inglourious Basterds, avec la scène du verre de lait. "Du coup, pour le mettre à l'aise (et rigoler un peu), on avait choisi de commencer l'interview en lui apportant... un verre de lait. On aurait dû s'abstenir. Waltz n'a visiblement pas d'humour. Et quand ça commence comme ça, après, il faut ramer, ramer et ramer encore. Ou comment une interview se transforme en traversée solitaire". Effectivement...

Albert Dupontel sur "Le Vilain"

La séquence fait régulièrement le bonheur des bêtisiers et autres compilations de ratés télévisuels depuis plusieurs années. 14 octobre 2009, Albert Dupontel dévoile son film Le Vilain, en duplex depuis Beauvais, sur France 3 dans le journal 18h30 aujourd'­hui présenté par Laurent Bignolas.

Dès le début de l'interview, le journaliste joue la transparence : il n'a pas eu le temps de voir le film. Ce qui ne manque pas de froisser l'acteur-réalisateur, qui dès lors répondra à trois questions de manière lapidaire, avant de lancer un cinglant : "Je mérite mon salaire ce qui n'est pas votre cas si vous ne voyez pas les films."

Alors que le journaliste tente d'expliquer la situation, l'artiste conclut l'entretien : "C'est votre boulot de voir les films avant d'in­vi­ter les gens. Je vous remercie infiniment de votre accueil. Merci beaucoup. Bonne soirée".

Laurent Bignolas expliquera par la suite au Parisien : "J'avais prévenu son atta­chée de presse et sa produc­trice que je n'avais pas eu le temps de voir le film. J'avais demandé un DVD qui ne m'est pas parvenu. Albert Dupon­tel était censé être au courant. Il n'était pas ques­tion pour moi de faire semblant. Ne pas avoir vu son film ne m'em­pêche pas de m'y inté­res­ser, de poser des ques­tions. On lui offre une tribune, il fait la gueule. Cela risque de se retour­ner contre lui."

La séquence malaise ci-dessous...

Quentin Tarantino sur "Django Unchained"

Et revoici l'inénarrable journaliste américain Krishnan Guru-Murthy de Channel 4 News, dont on a déjà parlé plus haut. Sauf qu'ici, il s'agit sans doute du plus gros malaise en interview... Le journaliste a donc rencontré Quentin Tarantino qui assurait la promotion de son Django Unchained.

Le malheur, c'est que le journaliste tente de surfer sur la triste actualité de la tuerie de l'école primaire survenue en décembre 2012 à Sandy Hook aux Etats-Unis, en voulant évoquer avec Tarantino son traitement de la violence au cinéma et la manière dont il la voit.

Ce qui, vu le contexte, est effectivement très maladroit parce qu'il laisse planer l'idée que le réalisateur aurait aussi une responsabilité au moins morale en tant que cinéaste dans le développement de la violence au sein de la société US et sa culture / fascination des armes à feu. Terrain miné donc.

De là, un Q.T forcément très remonté, qui lui lâche :

- "Je ne mordrais pas à l'hameçon ! Je ne suis pas votre esclave et vous n'êtes pas mon maître ! Je ne suis pas un singe !"

-"Je vous pose juste une question !"

- "...et moi je dit que je refuse d'y répondre ! [...] C'est une interview promotionnelle pour un film, ne faite pas d'erreur là-dessus ! Je n'ai pas envie de parler de l'implication de la violence. La raison pour laquelle je n'ai pas envie d'en parler, c'est parce que j'ai déjà tout dit sur le sujet il y a vingt ans. Si une personne s'intéresse à ce que je dit, elle n'a qu'à taper mon nom sur Google et elle verra. Je n'ai pas changé une seule fois d'avis sur le sujet. [...] Je refuse de me répéter, encore et encore".

La séquence, ci-dessous...

publié le 16 décembre, Olivier Pallaruelo, Allociné

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