Actus cinéma

Alien 2024 : pourquoi le film de science-fiction le plus attendu de l'année a le titre Romulus ?

La bande-annonce d'"Alien Romulus" a été dévoilée hier en fin de journée. A cette occasion, AlloCiné a pu s'entretenir avec Fede Alvarez, le réalisateur de ce 9ème film.

On lui doit le reboot d'Evil Dead en 2013, le jubilatoire Don't Breathe en 2016, et le reboot de Millenium avec Claire Foy. Le cinéaste uruguayen Fede Alvarez est de retour avec Alien : Romulus dont la bande-annonce a été dévoilée hier soir.

Ce neuvième opus de la saga lancée par Ridley Scott en 1979 est emmené par les jeunes Cailee Spaeny (Priscilla), Isabela Merced (Dora et la Cité perdue), Archie Renaux (Morbius, Shadow and Bone), Spike Fearn (The Batman, Aftersun), David Jonsson Fray (Industry) et Aileen Wu. Ces derniers vont se retrouver confrontés au visqueux Xénomorphe comme Sigourney Weaver des années avant eux.

Le synopsis officiel a d'ailleurs été dévoilé lors du lancement de la bande-annonce : alors qu'il entreprend des fouilles dans une station spatiale abandonnée, un groupe de jeunes voyageurs se retrouve confronté à la forme de vie la plus terrifiante de l'univers...

À l'occasion du lancement de la bande-annonce, nous avons pu nous entretenir avec le réalisateur. Ce dernier, grand fan de la franchise, avait pitché son idée de scénario à Ridley Scott des années auparavant. Après l'échec d'Alien Covenant, le cinéaste du film original a appelé Fede Alvarez pour lui proposer de donner vie à son histoire. Et le résultat semble être à la hauteur des attentes du maître, puisque Ridley Scott a affirmé que le film était excellent.

Alvarez nous explique ici avoir tenté de relier son film aux précédents volets. Alien : Romulus est "une lettre d'amour à tous les autres films de la saga" nous confie-t-il ainsi. Malgré tout, il n'est pas nécessaire d'avoir vu les huit autres films puisque ce long métrage est totalement indépendant des autres.

Alien : Romulus est annoncé dans nos salles obscures pour le 14 août prochain. Rencontre. 

AlloCiné : Dans une interview, Isabela Merced, l'une de vos héroïnes, racontait comment toute l'équipe avait dû détourner les yeux de l'écran en regardant l'une des scènes de ce nouveau film. Peut-on s'attendre à un film sanglant ?

Fede Alvarez : Le premier film était déjà très graphique. C'est difficile de faire mieux que l'explosion de la poitrine que les spectateurs ont vue dans le film en 1979. C'est difficile à surpasser. Mais je pense que nous avons obtenu quelques moments dans le film qui, d'après les premières réactions que nous avons eues en le montrant, marquent vraiment l'esprit des gens d'une manière unique. Mais sur ce type de scènes, la meilleure version est finalement plus dans votre esprit que dans ce que vous voyez réellement. C'est là où réside la beauté de la réalisation et la façon dont vous la menez. La partie la plus effrayante réside toujours dans votre esprit, dans ce que vous pensez qu'il se passe ou ce que vous pensez avoir vu. Il y a beaucoup de ça dans notre film.

Ce film, c'est ce que je voulais voir en tant que fan. AlloCiné : Comment le film s'inscrit dans la mythologie de la franchise "Alien" ?

Fede Alvarez : Ce film, c'est ce que je voulais voir en tant que fan. Et si vous êtes un jeune spectateur qui n'a jamais vu aucun de ces films, vous passerez tout de même un très bon moment. Je suis d'ailleurs un peu jaloux de ces gens qui vont découvrir ce film puis faire l'expérience de tout cet univers en une seule fois et découvrir toutes ces créations incroyables de Ridley Scott, James Cameron, David Fincher et Jean-Pierre Jeunet.

Découvrir cet univers pour la première fois, c'est incroyable. Mais si vous les avez tous vus, vous trouverez dans notre film beaucoup de connexions avec les autres longs métrages : dans l'histoire, les personnages, les créatures...

Une lettre d'amour à tous les films de la saga. D'une certaine manière, le film est lié à tous les autres. C'est vraiment une lettre d'amour à tous les films de la saga. J'aime tous les films Alien. Certains plus que d'autres, bien sûr. Mais chacun d'eux a eu un tel impact sur moi. Même quand je n'y trouvais pas ce que je voulais, il y avait des choses qui me marquaient et qui sont restées en moi pour toujours. Vous voyez ce que je veux dire ?

Ce n'est pas le cas de tous les films. La plupart des films, on les oublie, on ne se souvient même pas de les avoir vus. Un film Alien fait toujours forte impression, n'est-ce pas ? Il trouve toujours un moyen de vous exciter ou même de vous énerver. Pour moi en tout cas. Il y a une place dans mon cœur pour chacun d'entre eux. Je voulais donc que notre film puisse saisir toutes les occasions de se connecter à ces histoires.

AlloCiné : Ce film répondra-t-il aux questions laissées en suspens dans  "Prometheus" et "Covenant" ?

Fede Alvarez : Je ne veux pas en dire trop. Il y a cette citation qui dit que l'art pose des questions mais ne donne pas de réponses. Mes films préférés sont ceux qui ne répondent pas aux questions. Plus j'en sais, moins j'ai peur. Parce que la peur, c'est la peur de l'inconnu.

Plus j'en sais, moins j'ai peur. Je dirais donc que d'une certaine manière, notre film reprend des histoires dont nous pensions ne plus jamais entendre parler. Je peux vous dire cela. Comment le faisons-nous ? Vous devrez voir le film. Mais je ne voulais pas abandonner des histoires. Je déteste cela. Nous avons donc essayé de nous connecter à tous ces films et j'espère que vous aurez l'impression que c'est ce que nous avons fait lorsque vous regarderez le film.

AlloCiné : Diriez-vous qu'il s'agit d'un film autonome ou que c'est le premier d'un arc que vous construisez dans votre tête, comme une trilogie ou quelque chose comme ça ?

Fede Alvarez : Non, je ne pense pas qu'il s'agisse d'une trilogie. Il s'agit d'un film qui se tient, mais qui laisse la possibilité d'en faire plus et de développer l'histoire à partir de là. Mais je pense que ce n'est pas la bonne façon d'aborder un film. Les meilleures sagas jamais réalisées ne l'ont pas été en pensant qu'il y aurait un deuxième film. Jamais. Faire le film en pensant qu'il y en aura d'autres plus tard, cela corrompt le processus créatif de mon point de vue.

AlloCiné : Quel représentait le défi d'écrire de nouveaux personnages alors que la plupart des spectateurs viennent principalement pour voir la créature ?

Fede Alvarez : Je pense que les gens viennent pour voir les monstres, absolument. Mais si vous ne vous intéressez pas aux personnages, ce n'est pas effrayant. Je pense qu'à l'époque du premier film, les gens venaient pour la créature. Tout était si nouveau. Ça fonctionne si bien. Et ce qui le rend si effrayant, c'est le fait que l'on ne sait pas vraiment ce qu'est cette créature.

Aujourd'hui, il est difficile de le regarder sans avoir cette information. Mais à l'époque, je me souviens encore de la première fois que je l'ai vue enfant. Il n'y avait aucun moyen de savoir ce qu'était cette chose jusqu'à très tard dans le film. La peur de l'inconnu et la nature de cette chose, c'est ce qui rendait le film terrifiant.

Il n'y avait donc pas besoin de beaucoup de personnages pour nourrir cela. Ils avaient des personnages très caractérisés en revanche, qui semblaient réels et qu'on avait l'impression d'avoir déjà rencontrés et de connaître. C'est la beauté de ce film. Et c'est la même chose pour les autres films Alien. Vous avez des personnages que vous comprenez, mais vous n'allez jamais trop en profondeur dans leur vie ou leur monde.

Le titre est "Romulus", parce qu'on y parle de fratrie et des liens entre les personnages. Notre film est probablement le film Alien qui a le plus de caractérisation, pas en termes d'histoires mais de relations entre les personnages qui sont plus significatives. C'est pourquoi le titre est Romulus, parce qu'on y parle de fratrie et des liens entre les personnages, qu'ils soient liés par le sang ou par l'amitié. Ils ont grandi ensemble et se considèrent comme des frères et sœurs. Et le film pose la question de savoir ce que signifie vraiment le fait d'être le frère ou la sœur de quelqu'un. Il y a donc beaucoup plus d'éléments à cet égard. Mais si ce qui vous intéresse c'est de les voir mourir, croyez-moi, vous les verrez mourir ! Ne vous inquiétez pas pour cela.

AlloCiné : Quelle a été votre approche de la créature justement ? Est-elle différente des autres films ?

Fede Alvarez : La créature n'est pas différente. Je veux dire, elle l'est et elle ne l'est pas. Il y a définitivement plus qu'une seule créature. Nous avons essayé de revenir aux sources, comme vous pouvez le voir dans la bande-annonce. Il y a beaucoup de simplicité. Il ne s'agit pas d'un monde vaste.

Je voulais vraiment revenir à la simplicité d'une seule créature et des facehuggers et à l'envergure des premiers films. Du premier film surtout. En ce qui concerne la conception du monstre, pour certains moments du film, nous voulions quelque chose de très similaire aux films originaux. Comment avons-nous fait ? Nous avons tout simplement fait appel à la même équipe qui a construit les créatures originales sur Aliens le retour.

Ces gars avaient une vingtaine d'années à l'époque et ils sont maintenant dans la soixantaine et sont les meilleurs dans ce qu'ils font. Nous les avons fait venir pour qu'ils s'occupent de la création des créatures, de leur conception et de leur animation. Ils ont travaillé sur Aliens, sur Alien : la résurrection... Nous avons réuni cette incroyable équipe de créateurs de créatures, pour nous aider à recréer la même chose mais aussi pour aller au-delà lorsque nous devions créer des choses nouvelles.

AlloCiné : Parlez-nous de votre relation avec Ridley Scott. Quelle a été son implication ?

Fede Alvarez : Ridley a été présent dès le début du projet, quand nous avions le début de l'idée et que nous nous demandions quoi faire. Nous avons échangé avec lui, profité de sa sagesse et écouté ce qu'il sait à ce sujet. Personne ne connaît la saga Alien comme Ridley. Pouvoir l'écouter et comprendre plus que ce que l'on peut apprendre dans les films, c'était crucial, y compris au niveau du scénario. Une fois que j'ai eu un scénario, j'ai pu le partager avec lui.

La meilleure partie de la réalisation de ce film c'était de pouvoir m'asseoir à une table avec Ridley Scott La meilleure partie de la réalisation de ce film pour moi, personnellement, c'était de pouvoir m'asseoir à une table avec Ridley Scott, qui est l'un des maîtres de cet art dans ce genre, et de parler de cinéma avec lui. C'est le plus beau jour de votre vie.

Une fois le film terminé, j'ai pu lui montrer, discuter, apprendre et débattre aussi. J'ai des points de vue différents des siens sur certains aspects. Et c'est ce qui rend les choses intéressantes. Je débattais, je répondais, et il repoussait mes perspectives. C'est ce que l'on recherche quand on veut collaborer avec un cinéaste que l'on admire tant et que l'on veut faire un film ensemble.

Propos recueillis par Emmanuel Itier à Los Angeles le 18 mars 2024

publié le 21 mars, Yoann Sardet, Allociné

Liens commerciaux